À toi, L’enfant d’Alep

J’aurais voulu regarder plus loin avec toi, voir par delà ces ruines qui nous entourent, te montrer l’autre monde, celui des rues calmes et apaisées, celui des parcs verdoyants sur lesquels des enfants comme toi s’ébattent sur des structures protéiformes, celui des hauts immeubles où chacun s’échinent à se faire une vie plus douce.J’aurais voulu que tu goûtes une glace au chocolat que tu t’en mettes plein les joues, que tu croques dans un croissant frais avec beaucoup d’insouciance, te voir marcher en dansant dans les longues avenues, que ton sourire témoigne de ta légèreté de vivre. J’aurais voulu que pour toi tout ceci soit normal, que ça ne relève pas du fantasme ou du souvenir.

Toi l’enfant d’Alep, enseveli sous ces ruines, toi dont les bombes aveugles ont écourté la vie. Je pense à toi et à ton innocence, à ton petit corps meurtri, si fragile.

Je pleure sur vos visages inconnus, vous qui n’avez rien demandé, victimes de la folie de quelques hommes qui n’ont pour moi plus rien d’humains. Je ne fais pas partie de leur race, je suis un homo-sapiens comme toi et eux sont des animaux puants, des charognards laissant à d’autres le soin de tuer leur victime.

J’ai un enfant moi aussi, un enfant comme toi, je l’aime énormément et quand je le regarde dormir paisiblement, je pense à toi et à la vie que tu as dû mener pendant ces derniers mois. Je le regarde et je me demande comment, COMMENT peut-on faire souffrir une chose aussi belle et candide ? Je n’ai pas la réponse, les cyniques diront que la guerre suggère des victimes, je suggère à la guerre d’aller se faire foutre.

Excuse mon langage, je suis en colère.